Présentations de Joël Martin :
1.
Initiation
2.
Astropètries contrephysiques ou leçon d'astrophysique
3.
Contrepétries médicales
La Comtesse de Ségur aurait pu vous raconter ce charmant dîner si elle savait que vous n’étiez guère restés de grands enfants à l’esprit perverti. En effet, je sais bien que vous avez voyagé de par le monde, tenu votre plume pour faire de beaux rapports (parfaitement inoffensifs), appris à lire des grands auteurs, mais la Comtesse du
Canard Enchaîné est redoutablement plus difficile que celle de Ségur.
Remarquez, nous étions prévenus, puisque la dite Comtesse nous avait déjà fait l’honneur de sa présence à notre table dînatoire quelque part dans les années nonante, lorsque je n’étais pas encore membre de votre confrérie. Pour 2004, le gratin du club était présent : malgré la pluie, notre trésorier Philippe
1, jamais
collé était parvenu jusqu’à notre table sans être
mouillé ; Bernard, du Laboratoire des P
onts et Chauss
ées et webmestre dans tous ses états, annonce qu’on va dé
baller nos
sites... Seule Sa
bine, manquait à l’a
ppel. Bref, du beau monde je vous dis, même si un malotru au début du repas osa interpeller le maître de séance en lui lançant à la cantonade : «
goûtez-moi cette
farce » !
Lecteur régulier – mais non assidu – du
Canard Enchaîné, je fais partie de ces passionnés qui se plongent dans l’album hebdomadaire de la Comtesse avant même d’avoir déclamé l’édito de la semaine. C’est avec un plaisir parfaitement feint que j’ai eu l’occasion d’entendre ladite Comtesse décrire son savoir sur les contrepèteries, c’est-à-dire les lettres (belles ?) qu’on pétrit. L’exercice se veut simple : inverser deux lettres entre deux mots présélectionnés pour altérer une phrase qui prend un nouveau sens, allant du déplacé au plus salace. Vous pourrez choisir deux consonnes, deux voyelles, deux syllabes : le registre technique est assez large, et selon la Comtesse, la langue française se prête bien à cet exercice car elle est relativement atone. Vous vous attendez à trouver un /art
des lettres, mais Joël Martin - alias la Comtesse – est d’abord un scientifique (osez la lecture de l’intro) : « un physicien à la tr
aque de l’inf
ime » ! La recherche du contrepet l’a mordu vers 1978…et il prit ensuite la succession de Luc Etienne – qui inventa le mot contrepet – à la rubrique du Canard Enchaîné…En bon scientifique, il expose une méthode systématique et rigoureuse pour créer des contrepets : placer un mot à l’origine et faire muter en axe des ordonnées les voyelles et en axe des abscisses les consonnes. Ceci permet une recherche systématique des correspondances vocaliques ouvrant le champ de création de contrepets. A ce stade le charme est un peu rompu. On peut même y ajouter la troisième dimension – au tableau, cela devait ressembler à des choses vues il y a très longtemps en classe de terminale, genre espace vectoriel - et le génie de la création verbale devient infini. Mais vous avez carrément mal à la tête. Par contre la sensibilité aux
bons
mots reste de l’ordre de l’intuitif… C’est donc quand même un art…l’art de dé
caler les
sons.
Bien que destinés à être lus (fait de civilisation), les contrepets sont d’abord un art oral et Joël Martin – en tant que mélomane – nous sensibilise à cette dimension de l’oreille intellectuelle pour décoder les meilleurs contrepets : trop de visuel, de lecture fait parfois obstacle à un bon décodage des meilleurs contrepets. On dé
code alors fort mi
nablement. Laissons donc l’oreille voir ce qui doit être lu pour que le contrepet soit compris ! Œuvre culturelle et cultuelle, la Comtesse défend la langue française, car elle est intraduisible et a reçu à ce titre les félicitations d’un ex-ministre (de la culture) dont on taira le nom. Tous les genres se prêtent à l’exercice : l’espace (thème normal pour un astrophysicien) qui vous rappelle que la
navette déco
lle et que le p
anneau raffermit l’
orbite. Pensez même aux impôts : vous pourrez vous justifier par un courrier expliquant que vous n’avez jamais en
tassé de pé
cule.
L’art quelque peu salace du contrepet vous incommode ? Rassurez vous, de manière très sérieuse et didactique le contrepet existe aussi pour les enfants et Joël Martin écrit également à leur intention. Des ouvrages d’ailleurs repris par certains orthophonistes pour le travail des syllabes. Evidemment le nature revient au galop : grâce à la lecture de tels ouvrages, tous les bambins devenus grands ne diront plus jamais : « j’ai eu des e
nnuis dans la
vie ».
Un conseil que je n’ose jamais mettre en pratique : si vous calez sur un album un peu récalcitrant, Joël Martin vous invite à contacter le
Canard Enchaîné pour avoir la réponse. Vous n’aurez plus cependant le plaisir d’entendre des cochonneries au téléphone, car le journal a renoncé à vous faire répondre par des standardistes… sous peine de faire ressembler ce prestigieux hebdomadaire à une offre de certains services spécialisés.
Vous vous demanderez bien entendu pourquoi la Comtesse s’appelle la comtesse ? Et bien, il y eut une comtesse qui, un jour, prêta son nom à ladite rubrique du
Canard Enchaîné afin de déplaire à un mari – comte de son état – dont elle divorçait. La famille ayant protesté contre le stupre dans lequel le nom de la lignée était noyé, celui-ci fut supprimé à jamais et nous devons vivre avec un album d’une Comtesse devenue anonyme.
Pour rencontrer Joël Martin, je vous recommande un bon dîner : car comme il nous le rappelle, « Joël Martin c’est vraiment mortel à jeun ». Mais attention mesdames à la « main aux jarretelles ». Et pour finir la soirée, « Messieurs, que votre ver
be soit en
joie ! »
Si vous voulez relire cet article, je vais vous l
aisser le f
ichier ! Et pour finir : « La caille couve au coin d’un pont
2 ». Vous apporterez à Joël Martin la solution lors de notre prochain dîner. Dans l’attente faites de beaux rêves, car ce contrepet vous garantit de nombreuses nuits blanches et n’oubliez pas : le contrepet ne se méfie pas de la contrefaçon, comme dirait la télé.
Xavier Delvart (MP 1993)
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2 Cette phrase est un « faux contrepet »… qui en est lui un vrai !!
Commentaire de J. Martin : "Je ne me sens nullement berné par votre site."