MINI-MISSION/VISITE EN FRANCE
Millau, Juin 2004
Viaduc de Millau

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Visite du chantier

Présentation du projet par J-C. Mutel et C. Servant (Eiffage TP) - le viaduc vu d'en-bas (rives N et S du Tarn) - les piles - le tablier - remorque de transport des pylônes et pylône couché - haubans et gaines - pylônes dressés - raccordement des tabliers nord et sud à l'aplomb du Tarn - intérieur du caisson à dalle orthotrope et extrémité sud - gare de péage.


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Présentation du projet
Le groupe EIFFAGE réalise et finance intégralement les travaux de construction du viaduc de Millau (aucune subvention publique ne vient donc financer le projet), dont il a obtenu la concession pour une durée de 78 ans (3 ans de construction et 75 ans d'exploitation), à travers sa filiale la Compagnie Eiffage Viaduc de Millau (CEVM).

EIFFAGE est né en 1992 de la fusion (OPA amicale) entre Fougerolles et la Société Auxiliaire d’Entreprise (SAE). La société Eiffel Construction (métallique) fait partie du groupe EIFFAGE à qui elle a donné son nom, le suffixe GE signifiant "Groupement d'Entreprises".

Le viaduc de Millau est un pont multi-haubané, qui a été conçu par Michel Virlogeux (SETRA) et dessiné par l’architecte Norman Foster, l’ingénierie proprement dite étant l’œuvre de trois sociétés, EEG, SERF et SOGELERG.

1. Les principales caractéristiques du viaduc

Les principales caractéristiques du viaduc sont :
- hauteur : 270 m sous le tablier au droit du Tarn, 343 m au sommet du pylône de la pile P2,
- longueur : 2 460 m, pente de 3% montant vers le sud, en légère courbe (rayon de courbure de 20 km, devinette : pourquoi cette courbure ?),
- largeur du tablier : 32 m avec 2 x 3 voies de circulation,
- huit travées, dont six de 342 m et deux d'extrémités de 204 m, reposant sur sept piles creuses et soutenues par 154 haubans (une nappe monoaxiale) fixés à 7 pilônes de 89 m de hauteur et 700 t chacun,
- poids du tablier d’acier : 36 000 tonnes, soit 4 fois la tour Eiffel !
- volume de béton : 85 000 m3, soit 206 000 t, pour les culées et les piles,
- tablier continu, solidarisé aux piles (dédoublées pour mieux absorber les dilatations/rétractions : jusqu’à 2,20 m sur la longueur), avec joints de dilatation aux seules deux extrémités,
- garantie de l'ouvrage : 120 ans.

2. Les principales dates

Après les études de tracés entre 1987 et 1991 le choix de la solution haute a été retenue pour le franchissement du Tarn. En 1993-94, 7 architectes et 8 bureaux d'étude ont été consultés séparément, puis regroupés en 5 binômes, et ont proposé diverses solutions (pont en arc, en encorbellement, multi-haubanné, etc.). Après la déclaration d'utilité publique en janvier 1995, le jury oeuvrant pour le compte de la Direction des Routes du Ministère des Transports, a retenu le 9 juillet 1996 la solution multi-haubannée de Sogerlerg, EEG et SERF (+ M. Virlogeux) et Foster. La décision de mise en concession a été prise en 1998, par le Ministre des Transports J-C. Gayssot, pour accélérer la réalisation de ce viaduc, qui consacrera l’autoroute A75 comme une véritable alternative attractive aux grands axes Nord-Sud déjà très chargés que sont l’A10 et l'A20 à l’ouest et l’A6/A7 à l’est, et par rapport auxquels elle économisera 60 km.

Quatre groupements (CEVM, Dragados/Skanska/Bec, ASF/Egis/GTM/Bouygues/SGE/Autostrade et Générale Routière/Via-GTI/Cintra...) ont répondu au concours lancé en juin 2000. En mars 2001, la CEVM (Eiffage) est retenue comme concessionnaire préssenti après 9 mois d'étude ayant mobilisé 80 personnes (et une mise en concurrence interne entre Eiffage TP et Eiffel avec une solution entièrement béton et celle adoptée à tablier métallique). Entre mars et mai 2001 ont eu lieu les négociations, en août le Conseil d'Etat a approuvé le decret de concession, adopté le 8 octobre.

Les travaux ont débuté en octobre 2001 avec les fondations, les culées, puis la levée des piles et des palées provisoires entre chaque pile (en partant des rives). En juillet 2002 l'assemblage du tablier commence sur les Causses rouge et du Larzac, à partir d'éléments fabriqués à l'usine Eiffel de Lauterbourg en Alsace, puis pré-assemblés à Fos-sur-Mer et enfin acheminés par convois routiers exceptionnels sur le site. Le lançage du tablier débute en février 2003. Les piles de béton ont été achevées en novembre 2003.
La jonction des tabliers nors et sud a eu lieu le 28 mai 2004. Le clavage du tablier a été réalisé en juin.

La mise en place du revêtement est prévu en septembre, le démontage des palées provisoires et les essais en novembre, et l'inauguration officielle le 14 décembre 2004, aprè 38 mois de travaux.

3. Les chiffres financiers

L’investissement total d'EIFFAGE s’élève à environ 375 M€. L'Etat avait auparavant investi pour 25 M€ d'études.

Le tarif du péage est :
- voitures : 4,6 € et 6,10 € en juillet et août (ndlr. 5,4€ et 7€ en 2007),
- camions : 19 € (ndlr. 26,4€ en 2007).

Le contrat de concession (78 ans) peut être racheté par l'Etat à partir du 1 janvier 2045 avec versement d'indemnités prévues, ou arrêté par le concédant lorsque les chiffres d'affaires cumulés et actualisés au taux de 8% (valeur fin 2000) dépasseront 375 M€. Le trafic prévu est de 10 000 véhicules/jour au début et 20 000 en 2010.

La rentabilité de l’investissement semble assurée d’après nos interlocuteurs, très optimistes sur le trafic prévisionnel. EIFFAGE table sur un trafic journalier d’environ 25 000 véhicules en été et 10 000 en hiver, dont environ 10% de poids lourds.
ndlr.: en 2005 et 2006 le trafic moyen a atteint 12 000 véhicules/jour, soit 8% de plus que les prévisions.

Le coût de maintenance sera marginal : un peu de peinture et réfection de l’enrobée, non significatif par rapport à l’amortissement de l’investissement initial. L’exploitation, y compris le balisage sur le viaduc, voire le déneigement et l'entretien de la chaussée du viaduc et de ses emprises nord et sud, est entièrement du ressort de la société EIFFAGE (qui disposera ainsi de ses propres chasse-neige).

4. L’organisation

La gestion de la planification proprement dite du projet (effectuée sur l’outil Primavera) occupe à plein temps deux personnes chez le maître d’œuvre et autant pour chacune des entreprises.

5. La logistique

Les éléments d’acier du tablier ont été coulés dans l’usine de Lauterbourg en Alsace, et transportés en 1500 unités de transport exceptionnel par la société Capel (spécialisée dans le transport de gros gabarit très pondéreux) en transport spécial de nuit (72 heures de délai).

6. La sécurité et les calculs

Les normes de sécurité et la rigueur des calculs sont beaucoup plus strictes pour un ouvrage d’art (ex. : ponts) que pour les constructions (ex. : terminal CDG2E, pour ne pas le citer, car la question a été posée par l’un des membres de la mission).

A titre indicatif, les pylônes d'acier de 700 t ont été déplacés sur le tablier par quatre chariots automoteurs dont la masse cumulée équivaut à celle de 25 camions de 40 tonnes ! Qui peut le plus peut le moins...

Le béton utilisé pour les piles et culées est du B60, donc capable de résister à 60 MPa en compression, alors que du B20 est habituellement utilisé pour la construction des bâtiments, et du B30 ou 40 pour les ponts usuels.

En cas de feu, deux réserves d’eau sont prévues à chaque extrémité du viaduc. Le feu (d'un poids lourds par exemple) n’est pas considéré comme un risque grave, compte-tenu de la dispersion de la chaleur en plein air avec exposition au vent. En cas d'incendie, le tablier ne serait pas touché, et seuls les haubans sont exposés ; mais même avec trois haubans rompus, cela ne mettrait pas en péril le viaduc. Chaque câble est composé de 92 torons indépendants, constitués eux-mêmes de 7 fils enroulés autour d’un toron central. Un toron a une capacité de rupture de 28 tonnes, et travaille en fait à 50% de cette capacité, soit 14 tonnes, sur le viaduc de Millau.

Les calculs et tests de résistance au vent (très critique dans cette vallée) ont été réellement poussés à l’extrême, y compris pour des vents centennaux simulés. Le viaduc pourrait résister à des vents jusqu'à 280 km/h.

En fait, la phase de construction dimensionne l’ouvrage. Les vents de construction (sur une période de trois ans, ne l’oublions pas) pris en considération sont des vents décennaux, équivalents à 90% du vent de service. Le lançage a été fait avec des vents jusqu’à 85 km/h : au-delà, le lançage était suspendu.

La masse de ferraillage dans les puits de fondation des piles atteint…200 kg/m3. C’est le ferraillage le plus lourd de l’ouvrage.

En tout, le budget d’étude a atteint 30 à 40 M€, moitié pour l’administration (soufflerie, études géo-techniques, marchés de définition,…) et moitié pour EIFFAGE (40 ingénieurs et projeteurs).

7. Les facteurs-clés du succès d’Eiffage dans ce projet

Les atouts ayant permis à EIFFAGE d'être retenu pour ce projet sont :
- respect des délais,
- unicité d’interlocuteur : groupe EIFFAGE, pas de consortium avec des tiers,
- interlocuteur autonome financièrement,
- technologies déjà éprouvées,
- risques maîtrisés.

Les prix des divers concurrents n’ont pas été très différents, tous ayant aligné leurs prix au-dessous de la barre psychologique de 2 Mds de FF.
Néanmoins EIFFAGE a pu faire des économies - et donc proposer un niveau de péage assez bas - car son président (J-F. Roverato) a décidé d'auto-financer l'intégralité des travaux en engageant près du tiers de la trésorerie du groupe pendant les 38 mois du chantier. Il a ainsi pu emprunter, une fois l'ouvrage en service et le trafic au rendez-vous, le montant des travaux à des taux nettement plus bas qu'avant la réalisation avec les risques inhérents à un tel chantier.

Rappel de l’écrémage successif :

- nombre de cabinets candidats au premier tour : 35 cabinets d’architectes + 17 cabinets d’études,
- nombre de cabinets consultés au second tour (pour un premier marché de définition) : 7 cabinets d’architectes + 8 cabinets d’études,
- nombre de cabinets pré-sélectionnés au troisième tour : 5 cabinets d’architectes + 5 cabinets d’étude,
- enfin le maître d’ouvrage a décidé pour le deuxième marché de définition de « marier » les cabinets d’architecte et les cabinets d’étude en fonction de la proximité de leurs propositions respectives.

…il n’y a pas que dans les prépas que l’on écrème... !

Thierry Courtiol (MP 1983) et Bernard Jacob (MP 1979)